J’ai été invitée cette semaine par la CELC (la Confédération Européenne du Lin et du Chanvre) à découvrir, parmi un groupe de journalistes et de blogueuses, la filière du Lin en France. Je suis donc partie vers le Nord, où nous avons tout d’abord visité l’entreprise Lemaitre Demeestere, l’une des plus anciennes sociétés textiles de France (créée en 1835) et surtout, l’un des derniers tisseurs réalisant 100% de sa production en France.

Si vous avez regardé comme moi récemment un reportage sur la filière du lin, passé dans l’émission Capital, vous en aurez gardé l’impression que les fibres de lin produites en France sont toutes envoyées à l’autre bout du monde pour être tissées dans des pays où la main d’œuvre est bon marché.

Même si cela représente une énorme part du marché, il est important de souligner qu’il existe encore des tisseurs en France, comme la société textile Lemaitre Demeestere !

Lors de la visite, j’ai été hypnotisée par les machines à tisser, rassemblées dans un des bâtiments de l’entreprise, produisant un bruit qui nous empêchait d’entendre les explications du chef de production, à moins d’être tout près de lui ! Je vous propose de découvrir cette ambiance dans la vidéo ci-dessous, accompagnée de la chanson “Tisserand“, d’Yves Duteil. (Cliquez sur la croix si une pub vient vous embêter !)

Chacune des plaques de métal que vous avez vues sur les machines à tisser correspond à un fil, glissé à travers la plaque. Ainsi, si le fil casse, la plaque tombe et la machine s’arrête.

Quant à la machine ci-dessous, aperçue également dans la vidéo, elle noue chaque fil du dessus du tissu avec le fil qui lui correspond en dessous.

La lumière était vraiment très belle dans ce bâtiment et mettait en valeur les couleurs naturelles des fils tissés et des tissus produits.

Nous avons terminé la visite par les stocks et par une présentation d’échantillons, certains lourds et souples, pour un beau tombé de rideau, d’autres soyeux, froissés, texturés ou encore ornés de motifs comme de mignons moutons que nous avons vus sur une des machines. Tous ces tissus se diffèrencient des tissus utilisés pour les vêtements, dont le grammage au mètre carré est bien inférieur.

Implantée à Halluin, à quelques kilomètres de Lille, l’entreprise concentre en effet son activité sur les tissus “lourds” destinés à l’ameublement et la décoration. Ils sont tous faits de fibres naturelles, et plus particulièrement en lin, fibre écologique par excellence (je vous en parlerai plus en détail dans un prochain article) qui donne des fils à la fois fins et résistants, qui ont en outre la propriété naturelle de bien résister aux UV et d’absorber l’humidité (ce qui rend les vêtements ou les draps en lin très agréables en été.)

La société est très attachée au fait que sa production soit française (en faisant par exemple travailler des teinturiers géographiquement très proches de l’entreprise) et à ce que son bilan carbone soit aussi bas que possible. Cela a valu à cette entreprise d’être la seule société textile française à intégrer le club prestigieux des “Masters of Linen” (Maîtres du Lin), club d’entreprises textiles européennes qui ont fait le choix de la traçabilité 100% européenne, qu’il s’agisse de la culture du lin, du teillage (transformation en fibres), de la filature, ou du tissage.

Aujourd’hui, Lemaitre Demeestere collabore également avec des designers pour imaginer de nouveaux textiles pour la maison. À nos questions sur des teintures “vertes”, qui compléteraient formidablement ces textiles aux vertus écologiques, le directeur nous confirme que ce serait l’un de ses souhaits mais que cela nécessite un partenariat avec des teinturiers qui pourraient faire les essais de teinture à l’échelle industrielle, ou avec une unité de recherches, partenaires sans lesquels ils ne peuvent pas évoluer de ce point de vue.

La visite est presque terminée. Me restera en mémoire la gentillesse de l’accueil, la disponibilité des ouvriers qui répondaient à nos questions sur les machines… où les devançaient, mais aussi le charme rétro de ces bâtiments, que n’ont pas les usines modernes, et les moutons de bourre, cette fibre échappée du fil qui vole partout et laisse son empreinte dans l’air, sur les bobines, les rouleaux, ou sous les toits.

Si vous êtes intéressés par ces tissus de qualité, récemment encore destinés exclusivement aux professionnels, sachez que Lemaitre Demeestere s’ouvre petit à petit aux particuliers et propose sur son site la vente de certains tissus.

En attendant mon prochain reportage sur le lin fibre et le teillage, voici quelques liens pour aller plus loin :
– Lemaitre Demesteere : www.lemaitre-demeestere.com
– CELC : linenandhempcommunity.eu
– Masters of Linen : www.mastersoflinen.com